LIVRE PREMIER
RAMA LE CYCLE ARYEN
IV LE TESTAMENT DU GRAND ANCÊTRE
Par sa force, par son génie, par sa bonté, disent les livres sacrés de l'Orient, Rama était devenu le maître de l'Inde et le roi spirituel
de la terre. Les prêtres, les rois et les peuples s'inclinaient devant lui comme devant un bienfaiteur céleste. Sous le signe du bélier, ses
émissaires répandirent au loin la loi aryenne qui proclamait l'égalité des vainqueurs et des vaincus, l'abolition des sacrifices humains et de l'esclavage,
le respect de la femme au foyer, le culte des ancêtres et l'institution du feu sacré, symbole visible du Dieu innommé.
Rama était devenu vieux. Sa barbe avait blanchi, mais la vigueur n'avait pas quitté son
corps et la majesté des
pontifes
de la vérité reposait sur son front. Les rois et les envoyés des peuples lui offrirent le pouvoir suprême. Il demanda un an pour réfléchir,
et de nouveau il fit un rêve. Car le Génie qui l'inspirait lui parlait dans son sommeil.
Il se revit dans les
forêts de sa
jeunesse. Lui-même était redevenu jeune et portait la robe de lin des
druides. La
lune donnait. C'était la nuit sainte, la Nuit-Mère où les peuples attendent la renaissance du
soleil et de l'année. Rama marchait sous les chênes, prêtant l'oreille comme jadis aux voix évocatrices de la
forêt. Une belle femme vint à lui. Elle portait une magnifique
couronne. Sa fauve chevelure avait la
couleur de l'or, sa peau la
blancheur de la neige et ses yeux l'éclat profond de l'azur après l'orage. Elle lui dit : « J'étais la
Druidesse sauvage ; par toi je suis devenue l'
Epouse rayonnante. Et maintenant je m'appelle Sita. Je suis la femme glorifiée par toi, je suis la race blanche, je suis ton
épouse. Oh, mon maître et mon roi ! N'est-ce pas pour moi que tu as franchi les
fleuves, charmé les peuples et terrassé les rois ? Voici la récompense. Prends cette
couronne de ma main, place-la sur ta tête et règne avec moi sur le monde ! » Elle s'était agenouillée dans une attitude humble et soumise, offrant la
couronne de la terre. Ses pierres précieuses jetaient mille
feux ; l'ivresse d'
amour souriait dans les yeux de la femme. Et l'
âme du grand Rama, du pasteur des peuples, en fut émue. Mais debout sur la cime des
forêts, Déva Nahousha, son Génie, lui apparut et lui dit : « Si tu mets cette
couronne sur ta tête, l'Intelligence divine te quittera ; tu ne me verras plus. Si tu étreins cette femme dans tes bras, elle mourra de ton bonheur. Mais si tu renonces à la posséder, elle vivra heureuse et libre sur la terre et ton
esprit invisible règnera sur elle. Choisis : ou de l'écouter ou de me suivre. » Sita toujours à genoux regardait son maître avec des yeux perdus d'
amour, et, suppliante, attendait la réponse. Rama garda un instant le silence.
Son regard plongé dans les yeux de Sita mesurait le
gouffre qui sépare la possession complète de l'éternel adieu. Mais sentant que l'
amour suprême est un suprême renoncement, il posa sa main libératrice sur le front de la femme blanche, la bénit et lui dit : « Adieu ! Sois libre et ne m'oublie pas ! » Aussitôt la femme disparut comme un fantôme lunaire. La jeune
Aurore leva sa baguette magique sur la vieille
forêt. Le roi était redevenu vieux. Une rosée de larmes baignait sa barbe blanche et du fond des
bois une voix triste appelait : « Rama ! Rama ! »
Mais Déva Nahousha, le Génie resplendissant de lumière, s'écria : A moi ! Et l'
Esprit divin emporta Rama sur une montage au nord de l'Himavat.
Après ce rêve qui lui indiquait l'accomplissement de sa mission, Rama réunit les rois et les envoyés des peuples et
leur dit : « Je ne veux pas du pouvoir suprême que vous m'offrez. Gardez vos
couronnes et observez ma loi. Ma tâche est finie. Je me retire pour toujours avec mes
frères initiés sur une
montagne de l'Airyana-Vaéia. De là, je veillerai sur vous. Veillez au
feu divin ! S'il venait à s'éteindre, je reparaîtrais en
juge et en vengeur terrible parmi vous ! » Là-dessus, il se retira avec les siens sur le mont Albori, entre Balk et Bamyan, dans une retraite connue des seuls
initiés. Là, il enseignait à ses
disciples ce qu'il savait des secrets de la terre et du grand Être. Ceux-ci allèrent porter au loin, en Egypte et jusqu'en Occitanie, le
feu sacré,
symbole de l'unité divine des choses, et les cornes de
bélier,
emblème de la
religion aryenne. Ces cornes devinrent les insignes de l'
initiation et, par suite, du pouvoir sacerdotal et royal
(12). De loin Rama continuait à veiller sur ses peuples et sur sa chère race blanche. Les dernières années de sa vie furent occupées à
fixer le
calendrier des Aryas. C'est à lui que nous devons les signes du zodiaque. Ce fut le testament du
patriarche des
initiés. Etrange livre, écrit avec des étoiles, en hiéroglyphes célestes, dans le
firmament sans fond et sans bornes, par l'Ancien des
jours de notre race. En fixant les douze signes du zodiaque, Ram leur attribua un triple sens. Le premier se rapportait aux
influences du
soleil dans les douze mois de l'année ; le second relatait en quelque sorte sa propre
histoire ; le troisième indiquait les moyens
occultes dont il s'était servi pour atteindre son but. Voilà pourquoi ces signes lus dans l'ordre inverse devinrent plus tard les
emblèmes secrets de l'
initiation graduée
(13). Il ordonna aux siens de cacher sa mort et de continuer son uvre en perpétuant leur fraternité. Pendant des siècles les peuples crurent que Rama portant la tiare aux cornes de
bélier était toujours vivant dans sa
montagne sainte. Dans les temps védiques, le Grand Ancêtre devint
Yama, le
juge des morts, l'
Hermès psychopompe des Indous.
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(12) Les cornes du
bélier se retrouvent sur la tête d'une foule de personnages sur les monuments égyptiens. Cette coiffure des rois et des grands
prêtres est le signe de l'
initiation sacerdotale et royale. Les deux cornes de la tiare papale viennent de là.
(13) Voici comment les signes du zodiaque représentent l'
histoire de Ram selon Fabre d'
Olivet, ce penseur de génie qui sut interpréter les
symboles du passé selon la tradition
ésotérique.
1. Le Bélier qui fuit la tête tournée en arrière, indique la situation de Ram abandonnant sa patrie, l'il fixé vers le pays qu'il quitte.
2. Le Taureau furieux s'oppose à sa marche, mais la moitié de son
corps enfoncé dans la vase l'empêche d'exécuter son dessein ; il tombe sur ses genoux. Ce sont les
Celtes désignés par leur propre
symbole qui, malgré leurs efforts, finissent par se soumettre.
3. Les Gémeaux expriment l'alliance de Ram avec les Touraniens.
4. Le Cancer ses méditations et ses retours sur lui-même.
5. Le Lion ses combats contre ses
ennemis.
6. La Vierge ailée la victoire.
7. La Balance l'égalité entre les vainqueurs et les vaincus.
8. Le Scorpion la révolte et la trahison.
9. Le Sagittaire la vengeance qu'il en tire.
10. Le Capricorne.
11. Le Verseau.
12. Les Poissons se rapportent à la partie morale de son
histoire. On peut trouver cette explication du zodiaque aussi osée que bizarre. En attendant, jamais aucun astronome ni aucun mythologue ne nous a lointainement expliqué l'origine ni le sens de ces signes mystérieux de la carte céleste, adoptés et vénérés par les peuples dès l'origine de notre cycle aryen. L'hypothèse de Fabre d'
Olivet a du moins le mérite d'ouvrir à l'
esprit de nouvelles et vastes perspectives. J'ai dit que ces signes lus dans l'ordre inverse marquèrent plus tard en Orient et en Grèce les divers degrés qu'il fallait monter pour arriver à l'
initiation suprême. Rappelons seulement les plus célèbres de ces
emblèmes :
la Vierge ailée signifia la
chasteté qui donne la victoire ;
le Lion, la
force morale ;
les Gémeaux, l'union d'un homme et d'un
esprit divin qui forment ensemble deux lutteurs invincibles ;
le Taureau dompté, la maîtrise sur la nature ;
le Bélier l'astérisme du
Feu ou de l'
Esprit universel qui confère l'
initiation suprême par la connaissance de la Vérité.