Biographie universelle ancienne et moderne Pascal II, successeur du
pape Urbain II, se nommait Rainieri ; né à Biede, en Toscane, et d'abord moine de
Cluny, il fut envoyé à Rome à l'âge de vingt-trois ans pour régler les affaires de son
monastère, et se fit connaître de Grégoire VII, qui, charmé de son mérite, le retint auprès de lui, l'honora bientôt de la pourpre, et le fit abbé de St-Paul hors de la ville. Elu au bout de quinze
jours après la mort de son prédécesseur, il s'enfuit
et se cacha ; il fallut employer une espèce de violence pour vaincre ses refus. C'était alors que Henri V, révolté contre son père,
recherchait l'appui de Rome pour couronner ses desseins. Il trouva les
dispositions les plus favorables dans le pape, car l'inimitié contre Henri IV était presque héréditaire dans la succession
pontificale. Pascal excommunia ce père plus malheureux alors que coupable, l'obligea de se démettre de l'empire, et protégea hautement son rival. Cependant Pascal ne trouva point dans ce prince la docilité qu'il semblait devoir attendre de ses bienfaits. Henri V lui résista au sujet des investitures : aussi la
division ne tarda pas à éclater entre eux. Henri voulait recevoir la
couronne des mains du pape et ne lui rien céder. Celui-ci avait quitté Rome pour aller chercher en Allemagne d'abord, ensuite en France, des secours contre son
ennemi. Ses démarches n'eurent pas des résultats très heureux ; il fut obligé de retourner en Italie, où Henri vint le trouver. Pascal résista ; Henri eut recours aux plus grandes violences. Il s'empara de la personne du pape : les Romains se révoltèrent, firent main-basse sur les Allemands, et faillirent à prendre le roi lui-même. Alors Henri redoubla de rigueur : par ses ordres, le pape fut dépouillé de ses ornements, et ensuite lié de cordes.
Pascal II résistait encore ; mais il céda enfin, avec larmes, aux prières de ses amis. Il abandonna les investitures à Henri, auquel il donna la
couronne, et
fut délivré à ce prix des mauvais traitements et de la présence de son persécuteur.
L'
Eglise était partagée sur cette question des investitures, où il paraissait si difficile alors de tracer des limites convenables entre les deux puissances, dont l'une devait exercer le droit d'institution
canonique, et l'autre celui de la mise en possession des biens temporels affectés
au bénéfice, et qui toutes deux n'étaient que trop portées
aux empiètements et aux usurpations. A Rome, le pape était blâmé par ceux qui avaient échappé à la persécution, et approuvé ou du moins excusé par ceux qui avaient été prisonniers avec lui. De Terracine, où il s'était retiré, le pape écrivit à ses détracteurs, rejetant sur la nécessité des circonstances tout ce qu'il pouvait y avoir d'irrégulier dans ses concessions, et promettant de corriger ce qu'il n'avait fait que pour éviter la ruine de Rome et de toute la province. Cependant deux
conciles assemblés, l'un à
Vienne et l'autre à
Cologne, avaient excommunié Henri V, non seulement comme hérétique, à cause de l'usurpation des investitures, mais même pour avoir extorqué du pape, par trahison et par
force, un décret aussi contraire aux saints canons et aux usages
du
saint-siège apostolique.
Pascal II assembla lui-même un
concile général dans l'
église de
Latran en 1117, où il exposa de nouveau toute sa conduite ; il reconnut ses fautes, si on voulait appeler ainsi ce que l'empire des circonstances avait exigé de lui, déclara nul le privilège qu'il avait accordé à Henri V, et renouvela la défense faite par Grégoire VII de donner ou de recevoir les investitures ; mais il ne prononça point d'
excommunications, quoiqu'il approuvât celles qui
avaient été lancées par d'autres
conciles et d'autres
évêques.
Pascal II était réservé à de
nouveaux chagrins. Le préfet de Rome venait de mourir. Des
séditieux,
sans doute partisans secrets de Henri V, élurent le fils à cette place,
et voulurent forcer le pape d'approuver cette élection pendant qu'il célébrait la messe du jeudi saint. Le pape s'y refusa. Les mouvements
séditieux continuèrent. Le lundi de Pâques, le pape fut assailli à coups de pierres par le jeune homme, à la tête de sa troupe. Le lendemain ils abattirent plusieurs maisons de ceux qui refusaient de le reconnaître ; et Pascal s'enfuit à Albano, et ensuite à
Bénévent. Henri, contre lequel des
évêques se déclaraient de nouveau, entre autres l'
archevêque de Mayence, revint à Rome sous prétexte de négocier la paix avec le pape, mais en effet pour se faire couronner une seconde fois par l'
archevêque de Prague (Voyez
Bourdin), que Pascal excommunia pour cet acte de déloyauté, dans un
concile tenu à
Bénévent. Cependant Henri quitta Rome à cause des chaleurs de l'été, avec promesse d'y revenir dans une saison plus favorable. Le pape profita de cette absence pour y retourner lui-même. Sa présence intimída ses
ennemis, et surtout le nouveau préfet, qui se cachèrent dans la ville.
Le pape se préparait à les réduire par la
force, lorsqu'une maladie de fatigue l'emporta le 11
janvier 1118. Il avait occupé le
saint-siège pendant dix-huit ans cinq mois et cinq
jours. On a de lui plusieurs lettres, entre autres une par laquelle il ordonne à l'abbé de
Cluny de communier sous les deux espèces séparées, et de ne plus tremper le pain dans le vin, suivant l'usage de cette
abbaye ; et une autre, adressée au clergé de Térouane, qui prouve que certains
prêtres avaient de la peine à se conformer aux décisions des
conciles qui leur défendaient le
mariage (
Collection des historiens de France, t. 15, p. 23).
Pascal II eut pour successeur Gélase II.
(Biographie universelle ancienne et moderne - Tome 32 - Pages 192-193)