Depuis nos études du
Mercure de 1939-1940,
et notre livre sur les
Templiers de 1949, des informations intéressantes
nous sont parvenues.
Elles ne nous permettent peut-être pas d'apporter
des solutions définitives aux problèmes concernant les
survivances du
Temple, ses sources d'
initiation, ses rapports avec les
fraternités ouvrières.
Elles semblent cependant ouvrir la voie à
des recherches plus complètes et moins générales.
Ce sont des renseignements parvenus de
Bourgogne,
province plus particulièrement architecturale et possédant
de grands domaines
templiers. Ils ne sont probablement pas les seuls
en France, mais sont assez précis pour offrir des bases certaines
aux recherches.
Ce fut d'autre part une région occupée
par les
Eduens, l'une des tribus qui, parmi les peuples
celtiques, tint
tête à César avec le plus de
force.
On nous signale d'abord, aux environs de Sohaux,
en Saône-et-Loire, les faits suivants : des fermiers se réunissent
le dimanche, après la messe, chez l'un d'eux, pour lire ensemble,
le chef couvert, des passages de l'
Evangile de
Saint-Jean et se remémorer
les hauts faits de l'
histoire des
Templiers.
Dans tout le pays autour de
Molay, d'où
venait le dernier grand Maître, des assemblées secrètes
de même genre se tiennent.
Or, de grandes Commanderies possédaient
là d'importantes propriétés.
Il est évidemment très difficile,
comme toujours à la campagne, de faire parler les intéressés
et il n'y a rien d'écrit chez les pratiquants de ces survivances,
sauf I'
Evangile de
Saint-Jean.
Il s'agit d'une commémoration et d'une survivance
de Johannisme chez des agriculteurs.
Ce ne sont pas des descendants des chevaliers qui,
d'abord cachés, auraient reparu en des temps favorables. Il n'y
avait sûrement point, quelques siècles après la
disparition de l'Ordre, de
Templiers mariés et laïcisés
en
Bourgogne. Les proscrits se sont transformés, au Portugal
et en Ecosse, en soldats au service des princes. Ils sont devenus des
Chevaliers du Christ, ou de
Saint-André d'Ecosse sous Robert
Bruce, qu'ils avaient aidé contre ses
ennemis. Mais les serviteurs
et les protégés des commanderies n'ont jamais été
inquiétés. Il est donc vraisemblable qu'ils ont continué
à habiter les mêmes lieux dont ils étaient déjà
les exploitants à titre de locataires. On sait que des villages
étaient sous la protection des moines militaires et participaient
à la vie économique des commanderies.
Il put y avoir en même temps des uns et des
autres. Des hommes qui avaient pris à bail des terres abandonnées
et des descendants de ceux qui travaillaient pour eux, non pas en serfs
mais en coopération véritable d'employeurs et d'exploitants.
Ces gens aimaient les
Templiers, partageaient leur vénération
pour saint Jean, et ont très bien pu leur garder un souvenir
reconnaissant.
Nous avons déjà, en 1939 et 1940,
et
Le Mystère des Templiers, en 1949, le confirme,
rappelé qu'il n'y a plus de successeurs authentiques incontestables.
Il ne s'agit vraisemblablement pas de descendants de
Templiers laïcisés,
dont ne reste aucune trace certaine. Ces fermiers ne paraissent avoir
conservé qu'une
fidélité au Johannisme, commune
à tous les serviteurs de l'Ordre, et un souvenir des malheurs
de leurs maîtres.
Il existe un rituel de St-Jean, pratiqué
à la
cathédrale de St-Jean à
Lyon, mais il n'y
a pas de doctrine des deux
pontificats, bien nette au
XXe siècle,
celui de l'
Eglise intérieure complémentaire de l'
Eglise
extérieure, celle de Pierre.
S'il y a des partisans de cette interprétation,
ils sont aujourd'hui isolés et très secrets. Le rituel
johannique est plutôt une coutume.
L'
Evangile de Jean de Pathmos fut honoré
jadis surtout par les gens de métier, comme Livre de la Sagesse,
sur lequel on prêtait serment.
Son mysticisme était d'accord
avec les
conceptions du Monde du Travail et des Compagnonnages. Les
" Devoirs " actuels s'en servent en cette qualité.
Ne compliquons pas les choses ! Les
Templiers étaient
johannistes, comme probablement tous les
initiés chrétiens,
et les
Compagnons aussi. Si la préférence en question
a établi un lien commun entre eux et leurs servants, n'est-il
pas naturel que celui-ci ait subsisté chez les fils de ces derniers
? La rencontre, en tout cas, ne saurait être fortuite.
Sans doute, les fermiers de Sohaux, et autres de
la même région, n'attribuent pas au petit Livre toutes
les significations que lui donnaient les
Templiers instruits. C'était
l'
Evangile préféré de leurs anciens maîtres
et leur lien traditionnel, ce qui suffit à assurer chez eux une
survivance respectueuse très tenace.
Cette persistance existe probablement ailleurs,
mais l'exemple cité, dans une région où les domaines
templiers étaient nombreux, est en tout cas particulièrement
remarquable.
Y eut-il d'autres survivances, dans d'autres milieux
que ceux de la campagne ? Des renseignements oraux l'affirment, non
seulement dans les pays étrangers, mais en France même.
Nous ne retenons pas les récits généraux
de chevaliers réfugiés au Portugal et eu Ecosse. L'Ordre
se transforma en Ordre du Christ, exclusivement destiné à
des
Templiers émigrés d'abord, puis s'étendit à
des personnes que l'on voulait distinguer. En Ecosse, les moines-soldats
rendirent des services dans les armées du roi Robert Bruce, les
anciens chapelains laïcisés et maîtres d'œuvre affiliés
devinrent précepteurs des
enfants de nobles, ou utilisèrent
leurs talents d'architectes et de contremaîtres des commanderies
disparues dans la construction des
églises et des châteaux.
De nos amis ont vu en Grèce des papiers
de famille du XVIIIe siècle, scellés de cachets portant
croix pattée et abréviations connues, employées
par les
Templiers. Les gens qui les conservaient n'étaient pas
franc-maçons et appartenaient au
rite grec, dépendant
de Rome.
Ces témoins sont morts, et nous ne nous
occupions pas de recherches
templières quand ils nous en parlèrent.
Il peut y avoir des traces de ce genre dans l'
Europe orientale, où
les
Templiers se laïcisèrent, entrèrent dans les
organisations hostiles aux Turcs, exerçant pour vivre diverses
activités. S'agit-il de partisans secrets de Larmenius ?
Ce dernier paraît
apocryphe à
René
Guénon, parce que tous les Grands Maîtres selon lui étaient
français. Moins absolu, nous croyons que
L'Armenius n'est
qu'un surnom donné pour des exploits accomplis en Orient par
ce personnage, aimé sans doute des auxiliaires ou turcoples,
sorte de
légion étrangère, où les Arméniens
étaient nombreux.
Un correspondant très érudit, au
courant de l'
histoire secrète, nous signale qu'il existerait
un ordre très
fermé, réduit à quelques membres,
qui prétendrait, au contraire de ce que nous avons dit, avoir
reçu l'héritage des
Templiers. Ils obligeraient leurs
affiliés à démissionner de toute fraternité
laïque.
Nous soupçonnons d'en faire partie d'anciens
Maçons démissionnaires de leurs Loges sans motif donné,
qui ont abjuré devant le
prélat qualifié qui est
le Grand
Pénitencier.
Celui-ci exigerait d'eux, comme preuve de leur
soumission à l'
Eglise, le récépissé de leur
lettre de démission. La même obligation existerait vis-à-vis
de toute Société initiatique.
Le Grand
Pénitencier est un personnage fort
discret ; il faudra donc se contenter de cette présomption.
Lors de leur entrée dans l'ordre précité,
on leur ferait jurer protection du Trône, indication de leur pardon
aux descendants de Philippe le Bel et successeurs.
Les personnes qui nous rapportent ces choses le
font sous le sceau du secret. Nous ne pouvons donc recourir qu'à
la déduction, pour en vérifier l'authenticité.
Malheureusement, aucun document écrit ne nous est parvenu prouvant
la filiation directe depuis les Chevaliers. Nos informateurs n'ont pas
d'intérêt à inventer les faits, mais les prétendus
Templiers pourraient-ils prouver, s'ils le voulaient, cette filiation
?
Ce n'est pas la première fois que l'héritage
du
Temple s'affirme. Les
légendes se forment si aisément,
que ceux qui les transmettent finissent par y croire.
Quoiqu'il en soit, ce sont des indications précieuses
et des renseignements qu'un hasard heureux peut vérifier un
jour.
Quant au mélange de
Templiers avec des membres des pré-compagnonnages,
il paraît très probable. Dire que parce que les
Templiers
étaient soldats, non possesseurs de métiers, les Devoirs
n'ont pu les aider, c'est méconnaître la
charité
de ces derniers.
Leur amitié a été constatée
de tout temps. Les
Templiers protégeaient des
Compagnons dans
leurs commanderies et, quand les grandes famines décimaient des
provinces entières, leur assurait le ravitaillement.
La reconnaissance étant une vertu compagnonnique
et une forme de la solidarité, il est dès lors normal
que les gens de métiers les aient cachés et assistés
de leur mieux. Les Chevaliers en emmenaient avec eux en
Palestine, et
les chargeaient de la construction de leurs Kraks et de l'entretien
de leurs nombreux immeubles. Ils les rapatrièrent en France ensuite
avec soin. Dissimuler les
Templiers dans leurs équipes était
d'autant plus facile que d'assez nombreux chevaliers sortaient de familles
d'artisans, ou même avaient été
compagnons avant
leur entrée dans l'Ordre. Les Chapelains étaient plus
aisément utilisés. La plupart étaient capables
de mesurer ou de tracer, spécialités recherchées.
Si des liens très anciens des Compagnonnages
et du
Temple ne les avaient jadis réunis, on ne comprendrait
pas l'attachement des fils de Maître Jacques ou du Père
Soubise à la personnalité du dernier Grand Maître.
Il fut évidemment, au
XIIIe siècle, le chef très
regretté des uns et des autres.
Ceci nous intéresse, parce qu'on a attribué
la fondation du plus vieux des Devoirs, celui de Salomon, à Jacques
le Mineur, artisan juif débarqué en
Provence avec les
saintes
Marie. Dans les
légendes, on a fusionné ce Jacques
avec de Moler, constructeur de la
flèche de la
cathédrale,
d'
Orléans, tué par des ouvriers jaloux. A cette superposition
s'ajoute celle de Jacques de
Molay.
Cette hypothèse n'est que partiellement
acceptable. Elle rend compte en effet de l'appartenance de plusieurs
maîtres Jacques au Compagnonnage spécial de ce nom. Après
tout, de
Molay est aussi un
martyr pour les
enfants de Salomon,
rite
compagnonnique réputé introduit en France le premier aux
environs de l'ère chrétienne.
Cette vénération est commune aux
compagnonnages, mais il y a eu peut-être confusion de la part
des
Enfants de Salomon avec un Maître Yakoub étranger,
oriental, devenu Maître Jacques plus tard.
Par contre, il ne paraît pas y avoir inanimité
de souvenirs pour Jacques de Moler, ou le Maître Jacques, patron
du Devoir de ce nom, personnage
légendaire.
Les accointances entre
Compagnons et
Templiers
ne sont pas seulement celles-là, simple symbolisation des relations
des gens de métier et du
Temple. Il y en a de foncières
comme les hermétismes respectifs, cosmologiques, exprimés
par les figures et les nombres, et aussi les idées sociales communes.
On le constate, si on compare leurs rituels. Ils
semblent s'appliquer aussi bien à la défense de la chrétienté
qu'à celle du travail, s'extérioriser en gestes, signes,
paroles de même genre. La différence, apparente entre outils
d'un côté, armes de l'autre, ne doit pas arrêter
l'observateur. Ils ont les mêmes significations et se transposent,
ce qui a permis, plus tard, de continuer les grades d'architecture par
des grades de chevalerie dans la Franc-Maçonnerie écossaise.
Sans probablement s'en douter pour la plupart,
les Maçons spéculatifs des trois premiers degrés,
issus des Bauhütten des
cathédrales, ont sans difficulté
pu passer d'une forme opérative à une chevaleresque, parce
que se perpétuait ainsi une antique tradition des rapports entre
artisans et chevaliers.
On remarque aisément aussi l'emploi des
mêmes figures géométriques et des mêmes nombres
sacrés, chez les uns et les autres.
D'où cela vient-il ? Nous avons autrefois
accepté la thèse de Mathila Ghika : l'égypto-hellénisme,
et surtout le pythagorisme, sont, directement ou non, les
initiateurs
de toutes les associations de l'Occident et du Proche-Orient. Toutefois,
n'a-t-on pas un peu trop négligé chez nous les
influences
celtiques ?
En dehors du Devoir de Salomon, le plus ancien,
d'origine judéo-syrienne,
Compagnons et
Templiers, descendants
des Barbares christianisés, ne peuvent-ils avoir reçu
des enseignements de la part des
druides devenus chrétiens, heureux
de trouver des milieux disposés à transmettre leurs doctrines
?
Il y eut des clercs, leurs élèves,
chapelains des deux ordres, qui introduisirent
symboles et principales
idées dans les Devoirs et les chapitres du
Temple. On sait que
les
Cisterciens ont travaillé pour les
Templiers à titre
de convers, et que la première règle de ceux-ci leur fut
donnée par saint
Bernard, qui passe pour l'un des derniers
druides
chrétiens, secrets bien entendu. Ne serait-ce point le trait
d'union entre les deux groupes ?
La
croix templière a le même tracé
régulateur que la
croix celtique. Certaines orientations des
constructions du
Temple paraissent identiques à celles des
Celtes.
Les rotondes octogonales, répandues en Orient,
sont aussi bien chrétiennes que musulmanes. Le soubassement de
la Mosquée d'Omar est visiblement de cette forme, de même
que maints tombeaux à coupole, ou
qoubbat, arabes.
Le R. P. de Jephernion, auteur très érudit
de recherches proche-orientales, particulièrement sur les monuments
de la Cappadoce et des Iles, démontre leur existence avant l'Islam
chez les Chrétiens de Cappadoce. La forme aurait cheminé
par les îles de la mer
Egée et essaimé en Occident.
Or, le
symbole octogonal a été surtout
utilisé par les constructeurs
cisterciens en Espagne. Ce sont
eux qui ont donné les premiers cimborios de la péninsule,
et bâti ceux des
cathédrales de Salamanque et du nord de
l'Espagne.
Il y a des chapelles du
Temple qui sont rondes,
et les huttes des tribus
celtes ne l'étaient-elles pas également
?
Les
couleurs de l'étendard
Beaucéant
ne sont-elles pas les
couleurs symboliques des
druides dans les grandes
cérémonies ?
Le manteau blanc des
Templiers peut être
aussi bien un rappel de vêtement
celtique que l'imitation de celui
des Sarrasins.
La
Cène des Chevaliers du Christ n'est aussi
peut-être que la continuation de celle des chevaliers de la
Table
Ronde et du saint Graal.
Les nombres, surtout le 3, rappellent la triode.
On trouve des
triangles dans les monuments bâtis par les
Cisterciens
et les trois points du Compagnonnage parmi les graffiti du
donjon de
Chinon, où des
Templiers furent enfermés. Ce sont probablement
des figurations
celtiques plutôt que des reproductions pythagoriciennes,
d'autant que ces signes y voisinent avec un autre : les trois cercles
triadiques.
Les peuples aryens utilisaient le pentagramme pour
symboliser les
Eléments. Les
Celtes lui donnaient cette figuration,
et il est aussi gravé à
Chinon. Comme les Extrêmes-Orientaux,
ils comptaient 5 et non 4 directions de l'espace.
Et l'on sait que le pentagramme est un signe magique
antérieur au pythagorisme. Enfin, Pythagore l'avait-il reçu
des
Celtes ?
Il ne faut pas exagérer l'
influence proche-orientale
sur les
Templiers, ni sur les Compagnonnages. Cependant, les catéchismes
du Sinf, association du travail des pays
musulmans, présentent
de telles coïncidences avec ceux des Devoirs et de la Franc-Maçonnerie
opérative des Bauhütten des
cathédrales germaniques, qu'il
convient de les prendre en considération. Les gens de métier
peuvent en avoir eu connaissance par les artisans orientaux, décorateurs
partiels des
églises romanes, qu'ils côtoyaient journellement.
Ce n'est pas les allusions à des particularités
musulmanes qu'il faut retenir ici, quoiqu'elles soient fréquentes
dans les rituels du Sinf, mais des façons communes de parler,
des mots de passe, des signes de reconnaissance hérités
d'une lointaine origine.
Cependant, peut-on admettre que les islamismes
n'y sont probablement que des annexes à la
religion, de manière
à rendre moins suspectes, ou moins étrangères,
des survivances de coutumes très antérieures à
celle-ci ?
C'est ainsi que l'abréviation
Djames
remplace des abréviations anté-islamiques. Un des affiliés,
par exemple, prononce la première lettre Dj et l'interrogé
répond A, et ainsi de suite, (Dj est l'initiale de Djebrail,
l'
ange Gabriel qui apporta la prophétie, A celle d'Ali gendre
de Mohammed, M commence le nom de Mohammed, et S, celui de Sliman el
Farsi, patron des
Compagnons et ami affranchi du Prophète, trait
d'union entre les
Musulmans et les gens de métier. Sliman el
Farsi Salomon le
Persan fut un ancien zoroastrien, converti l'un des
premiers à l'Islam, et en même temps travailleur manuel).
Souvent, celui qui demande le fait sous cette forme
: «
Combien de nuds à ta ceinture ? Quatre,
répond l'interpellé.
Quels sont-ils ?
Dj. a. m. s Que signifient-ils ? », etc...
Ce genre de dialogue est fréquent dans les
Devoirs et la Franc-Maçonnerie à trois grades qui en est
dérivée, avec ses rituels, qui empruntent aux Fraternités
ouvrières. Les nombres sacrés 3, 5, 7, 9, sont révérés
dans le Sinf, comme dans les associations
européennes.
Les poignées de mains, les marches, paraissent
analogues.
Il conviendrait de savoir si les
Compagnons ont
adopté des orientalismes par leurs contacts avec les Sarrasins,
en accompagnant les
Templiers en
Terre Sainte. Le fait n'est pas impossible.
Mais ces Proche-Orientaux n'avaient-ils pas été
de simples transmetteurs de ce bagage, puisqu'ils furent en rapport
avec l'Egypte antique, la Grèce, bien avant l'Islam, et se servirent
de tout ce qui les a précédés.
Il y a incontestablement des
influences musulmanes
chez les
Templiers. On les rencontre dans leur vêtement, leurs
coutumes. (Par exemple dans celle de coucher tout habillés).
Il faut pour eux, comme pour les Arabes des premiers siècles,
pouvoir monter à
cheval en cas d'alerte nocturne. L'habitude
de se ceindre les reins est naturelle, répandue sur toute la
Terre. Mais les confréries de l'Islam donnent à la ceinture
le sens d'isolateur du Monde, de protecteur, objet transmis par l'
ange
Gabriel aux grands
initiateurs Mohamed, Ali, Sliman et, d'eux, par les
Karmates, aux ordres
religieux comme les Oadriva, où on peut
le constater dans le rituel de réception, ou au Sinf artisanal.
Ce sens lui a conféré une valeur
symbolique spirituelle,
très répandue en
Palestine. Elle a donc pu renforcer chez
les
Templiers un usage analogue. Nous avons longuement parlé,
dans le numéro spécial du
Voile d'Isis sur les
Templiers (1929), de ces rapprochements singuliers.
Il conviendrait de reprendre la question des emprunts
possibles des Chevaliers aux Sarrasins. Nous essayons en ce moment d'obtenir
certains éclaircissements sur les relations prouvées des
guerriers du
Temple avec les Ismailiens, les fameux Assacis, gardiens
aussi d'un lieu saint, la
Montagne d'Alamout.
Les mystères des rapports des
Croisés
avec les sectes hétérodoxes de l'Islam, en temps de paix
ou de trêve, sont encore mal connus. Les Proche-Orientaux s'y
intéressent.
Nous avons déjà quelque peu déblayé
le terrain, comblé plusieurs lacunes. Les obscurités de
l'
histoire du
Moyen-Age disparaissent les unes après les autres,
écartées enfin grâce aux nouvelles découvertes
des orientalistes sérieux.
Le temps des hypothèses passionnées
est révolu, celui du vraisemblable historique, en attendant des
certitudes, a heureusement commencé.