QUELQUES DIVINITÉS ALLÉGORIQUES
Harpocrate
Harpocrate, le
dieu du silence, avait, dit-on, une origine égyptienne : on le prétendait fils d'Isis et d'Osiris, et il est confondu par certains mythologues avec
Horus. En Grèce et à Rome, sa statue était fréquemment placée à l'entrée des temples, ce qui signifiait qu'il faut honorer les
dieux par le silence, ou que les hommes, n'ayant de la divinité qu'une connaissance imparfaite, n'en doivent parler qu'avec respect. Les anciens avaient souvent sur leurs cachets une figure d'
Harpocrate, pour apprendre qu'on doit garder le secret des lettres.
On le représentait sous les traits d'un jeune homme nu, ou vêtu d'une robe traînante, coiffé d'une
mitre à l'égyptienne, ou portant sur la tête un panier, tenant d'une main une corne d'abondance, et de l'autre soit une
fleur de lotus, soit un carquois. Le
symbole qui surtout le distingue est qu'il tient le second doigt sur la bouche pour recommander le silence et la discrétion. La chouette,
symbole de la nuit, est quelquefois placée au pied de sa statue.
Parmi les
arbres, le pécher et le lotus lui étaient particulièrement consacrés, parce que, dit
Plutarque, la feuille du pécher a la forme d'une langue, et son
fruit celle d'un cur,
emblème du parfait accord qui doit exister entre la langue et le cur.
Lara, ou Muta, ou Tacita
Rome avait aussi la déesse du silence qu'elle honorait sous
les noms de Lara,
Muta, ou Tacita.
Son culte avait été recommandé par le roi
Numa Pompilius qui avait jugé cette divinité nécessaire à l'établissement de son nouvel Etat.
Lara était une
naïade de l'
Almon, ruisseau qui se jette dans le Tibre, au-dessous de Rome. Jupiter, amoureux de
Juturne, n'ayant pu la trouver, parce qu'elle s'était enfuie et jetée dans le Tibre, appela toutes les
naïades du
Latium, et les pria d'empêcher la nymphe de se cacher dans leurs rivières. Toutes lui promirent leurs services. Lara seule alla déclarer à
Juturne et à
Junon les desseins de Jupiter. Le
dieu, irrité, lui fit
couper la langue, et donna ordre à
Mercure de la conduire aux Enfers ; mais, en chemin,
Mercure, épris de la beauté de cette nymphe, s'en fit aimer, et en eut deux
enfants, qui, du nom de leur mère, furent appelés
Lares.
La fête de cette déesse du silence se célébrait à Rome le 18
février. On lui offrait des sacrifices pour empêcher les médisances. Les Romains joignirent sa fête à celle des Morts, soit parce qu'elle passait pour être la mère des
Lares, soit que, ayant la langue coupée, elle était l'
emblème de la mort par son éternel silence.
Plutus
Plutus,
dieu des richesses, était mis au nombre des
dieux
infernaux, parce que les richesses se tirent du sein de la terre, séjour de ces divinités. Il naquit de
Cérès et de
Jasion, dans l'
île de Crète. Ce
dieu, dans sa
jeunesse, avait, paraît-il, une très bonne
vue ; mais, ayant déclaré à Jupiter qu'il ne voulait aller qu'avec la Vertu et la Science, le père des
dieux, jaloux des gens de bien, l'avait aveuglé pour lui ôter les moyens de les discerner. Telle est du moins la
légende d'Aristophane, auteur de la comédie intitulée
Plutus. Lucien ajoute que, depuis qu'il est aveugle, ce
dieu, qui de plus est
boiteux, va presque toujours avec les méchants.
On représente ordinairement
Plutus sous la figure d'un vieillard qui tient une bourse à la main. Il venait, suivant les anciens, à pas lents, et il s'en retournait avec des ailes, parce que les richesses s'acquièrent à la longue et sont vite dissipées.
Até et les Lites, ou Prières
Até, fille de Jupiter, déesse malfaisante, odieuse aux
mortels et aux
dieux, n'a n'autre occupation que de troubler l'
esprit des hommes pour les livrer au malheur.
Junon ayant trompé Jupiter en faisant naître Eurysthée avant
Hercule, le
dieu tourna tout son ressentiment contre Até, la
considérant comme auteur de tout le mal. Il la saisit par les
cheveux, la précipita sur la terre, et fit serment qu'elle ne rentrerait jamais dans les cieux. Depuis ce temps elle parcourt la terre avec une célérité incroyable, et se plaît dans les injustices et les calamités des mortels.
Les Lites, c'est-à-dire les Prières, sont les surs d'Até, et, comme elle, filles de Jupiter.
Homère les a dépeintes sous une ingénieuse
allégorie. « Elles sont, dit-il, boiteuses, ridées, ayant toujours les yeux baissés, l'attitude toujours humble, toujours rampante ; elles marchent après Até, ou l'Injure ; car l'Injure altière, pleine de confiance en ses propres
forces, et d'un pied léger, les devance toujours et parcourt la terre pour offenser les hommes ; et les humbles prières la suivent pour guérir les maux qu'elle a faits. Celui qui les respecte et les écoute en reçoit de grands secours ; mais celui qui les rejette éprouve à son tour leur redoutable courroux. » Elles ont un grand ascendant sur le cur de leur père, maître des hommes et des
dieux.
La Bonne Foi
La
Bonne Foi, déesse des Romains, avait son culte établi dans le
Latium à une époque très reculée,
antérieurement, dit-on, au règne de
Romulus. Le roi
Numa, par les conseils de la nymphe
Egérie, lui éleva un temple sur le
mont Palatin, et plus tard elle eut un autre temple au
Capitole, auprès de celui de Jupiter. Elle avait des
prêtres et des sacrifices qui lui étaient propres.
On la représentait sous la figure d'une femme vêtue de blanc, ayant les mains jointes. Dans les sacrifices qu'on lui faisait, toujours sans
effusion de sang, ses
prêtres devaient être voilés d'une étoffe blanche et en avoir la main enveloppée.
Deux mains jointes ensemble étaient le
symbole de la
Bonne Foi.
Un ancien
dieu des
Sabins,
Dius Fidius, ou simplement
Fidius, dont le culte passa à Rome, était aussi considéré comme le
dieu de la
Bonne Foi. Les Romains juraient par cette divinité. La formule de serment
Me Dius Fidius et, par abréviation,
Medi Edi signifiait : « Que
Dius Fidius me protège ! »
La Fraude, ou Mauvaise Foi
La Fraude ou Mauvaise Foi était une divinité
monstrueuse et infernale. On la représentait avec une tête humaine
d'une physionomie agréable, le
corps tacheté de différentes
couleurs, et le reste du
corps en forme de
serpent avec la queue d'un scorpion.
Le
Cocyte était l'élément où ce monstre vivait. Il n'avait que la tête hors de l'
eau, le reste du
corps était toujours plongé dans le
fleuve, pour montrer que les trompeurs offrent toujours de belles apparences et cachent avec soin le piège qu'ils tendent.
On l'a représentée aussi sous les traits d'une femme à double tête, moitié jeune, moitié vieille, nue jusqu'à la ceinture. De la main droite elle tient deux curs, et de la gauche un masque. De
dessous une jupe courte sortent la queue d'un scorpion et les serres d'un
vautour.
L'Envie
Les Grecs avaient fait de l'
Envie un
dieu, parce que le mot
phthonos, qui, dans leur langue, exprime l'
envie, est du masculin ; les Romains en firent une déesse.
Son nom,
Invidia, est dérivé d'un verbe qui signifie « regarder avec le mauvais il ». Pour garantir leurs
enfants du mauvais il, c'est-à-dire de l'
influence du génie malfaisant, les Grecs avaient recours à des pratiques superstitieuses, et il en était de même chez les Romains.
On représentait cette divinité sous les traits d'un vieux spectre féminin, ayant la tête ceinte de
couleuvres, les yeux louches et enfoncés, un teint livide, une horrible maigreur, des
serpents dans les mains et un autre qui lui ronge le cur. Quelquefois on place à ses côtés une
hydre à sept têtes.
L'
Envie est un monstre que le mérite le plus éclatant ne peut étouffer.
La Calomnie
Les Athéniens avaient fait de la
Calomnie une divinité.
Le grand peintre Apelle, ayant été calomnié par ses
envieux auprès de Ptolémée, roi d'Egypte, éclaira l'
esprit de ce prince en lui offrant un de ses chefs-d'uvre, admirable et saisissante
allégorie dont voici la description :
La
Crédulité, avec les longues oreilles de
Midas, est assise sur le trône ; l'
Ignorance et le
Soupçon l'environnent. La
Crédulité tend la main à la
Calomnie, qui s'avance vers elle, le visage enflammé. Cette figure principale occupe le milieu du tableau ; elle secoue une torche d'une main, et de l'autre traîne l'
Innocence par les
cheveux. Celle-ci est représentée sous la forme d'un jeune et bel
enfant, qui lève les mains au
ciel, et le prend à témoin des injustes traitements qu'il éprouve. Devant la
Calomnie marche l'
Envie, dont le principal emploi est de lui servir de guide ; et elle emprunte le secours de la
Fraude et de l'
Artifice, ce qui désigne sa difformité. A une certaine distance, on distingue le
Repentir, sous la figure d'une femme en deuil, aux vêtements déchirés, les yeux baignés de larmes, dans l'attitude du désespoir, et tournant les regards vers la
Vérité qu'on aperçoit dans le lointain et qui s'avance lentement sur les pas de la
Calomnie.
Les peintres modernes ont représenté la
Calomnie telle qu'une Furie, aux yeux étincelants, portant une torche à la main et torturant l'Innocence sous les traits d'un
éphèbe qui proteste en élevant les mains et les yeux vers le
ciel.
La Renommée
La Renommée était la messagère de Jupiter. Les
Athéniens lui avaient élevé un temple, et l'honoraient d'un culte réglé. Chez les
Romain, Furius Camille lui fit aussi bâtir un temple.
Les poètes la représentent comme une déesse énorme, qui a cent bouches et cent oreilles. Elle a de longues ailes qui, en
dessous, sont garnies d'yeux. Les artistes modernes l'ont peinte en robe retroussée, avec des ailes au dos et une trompette à la main.
Bellone
Dans la
fable de
Mars on a vu que
Bellone, sa sur ou sa femme, attelle et conduit avec la Terreur et la Crainte le char de ce
dieu. On considère généralement
Bellone comme fille de
Céto et de
Phorcys, famille de monstres à laquelle appartiennent les
Grées et les
Gorgones.
Celte
déesse personnifie la Guerre sanglante et furieuse.
Elle avait à Rome un temple dans lequel le Sénat donnait audience aux ambassadeurs. A la porte de ce temple était une petite colonne nommée la guerrière, à laquelle on jetait une lance toutes les fois qu'une guerre était déclarée. Mais son temple le plus fameux se trouvait à Comane, en Cappadoce : là son culte était célébré par une multitude de ministres de tout âge et de tout sexe. Plus de six mille personnes étaient employées au service de ce temple.
Indépendamment de ses fonctions auprès du
dieu Mars, cette déesse au front d'
airain, suivant l'expression d'
Homère, a son char, son cortège particuliers, et procède d'elle-mème à sa terrible mission. Armée à l'antique, le casque en tête, la lance à la main, montée sur son char qui renverse tout sur son passage, précédée de l'Epouvante et de la Mort, elle s'élance vers la bataille ou dans la mélée : sa chevelure de
serpents siffle autour de son visage enflammé, pendant que la Renommée vole autour d'elle, appelant au son de la trompette la Défaite et la Victoire.
La Paix
La Paix, fille de Jupiter et de
Thémis, eut un temple et des statues chez les Athéniens ; mais elle fut encore plus honorée chez les Romains, qui lui consacrèrent dans la Voie Sacrée le plus grand et le plus magnifique temple qui fût dans Rome. Ce temple, commencé par Agrippine, fut achevé par Vespasien : il renfermait les riches dépouilles que cet empereur et son fils avaient enlevées au temple de Jérusalem.
On représente cette déesse sous les traits d'une femme à la physionomie douce et bienveillante, portant d'une main une corne d'abondance, de l'autre une branche d'olivier. Quelquefois elle tient un
caducée, un flambeau renversé et des épis de blé. On lui faisait des sacrifices sans
effusion de sang.
Aristophane donne à la Paix, pour compagnes,
Vénus et les
Grâces.
La Discorde
La
Discorde, divinité malfaisante, fut chassée du
ciel par Jupiter, car elle ne cessait de troubler et de brouiller entre eux les habitants de l'
Olympe. Descendue sur la terre, elle se fait un criminel plaisir de semer partout où elle passe les querelles et les dissensions, dans les Etats, dans les familles, dans les ménages. C'est elle qui, n'avant pas été invitée aux noces de Thétis et de
Pélée, jeta au milieu des déesses la pomme fatale, cause de cette fameuse contestation dont
Pâris fut le
juge, et qui aboutit à la ruine de
Troie.
Les poètes lui donnent une chevelure hérissée de
serpents et attachée par des bandelettes sanglantes, un visage au teint livide, les yeux hagards, une bouche écumante, une langue qui distille un infect poison. Elle a les vêtements en lambeaux et de différentes
couleurs ; tantôt elle porte une torche allumée, tantôt elle est armée d'un poignard.
On l'a représentée aussi tenant à la main des rouleaux où on
lit ces mots : Guerre, confusion, querelle. Mais, sous cette image, on pourrait plutôt reconnaître la Chicane, dont le temple est le Palais de Justice, et dont les ministres fidèles sont les procureurs, les notaires et les avocats.
La Concorde
La
Concorde était, ainsi que la Paix, avec qui on la confond, fille de Jupiter et de
Thémis. On l'invoquait pour l'union des familles, des citoyens, des
époux, etc... Ses statues la représentent couronnée de guirlandes, tenant d'une main deux cornes d'abondance entrelacées, et de l'autre un faisceau de verges, ou une
grenade,
symbole d'union. Parfois on lui donne un
caducée, quand on veut exprimer qu'elle est le
fruit d'une négociation.
Chez les Romains, elle avait plusieurs temples ; dans le plus grand, celui du
Capitole, le Sénat tenait souvent ses assemblées.
La Justice
La Justice est au
ciel près du trône de Jupiter. Dans les arts on la représente sous la figure de
Thémis ou d'Astrée.
On la peignait sous les traits d'une vierge avec un regard sévère, mais non farouche ; son visage avait une expression à la fois de tristesse et de dignité.
La Prudence
La Prudence, déesse
allégorique, distincte de Métis, cette première
épouse de Jupiter, était représentée le plus souvent sous les traits d'une femme à deux visages, l'un regardant le passé, l'autre l'avenir. Les modernes lui donnent un seul visage, et, pour
emblème, un miroir entouré d'un
serpent ; quelques-uns y ajoutent un casque, une guirlande de feuilles de mûrier, un cerf qui rumine, et une
flèche avec le petit poisson appelé rémora.
Prés d'elle, on place encore une clepsydre, un
oiseau de nuit, un livre, etc., tous
symboles de la circonspection.
La Vieillesse
On sait que la
Jeunesse se confond avec
Hébé dont elle emprunte les traits. Quant à la Vieillesse, triste divinité, elle est fille de l'
Erèbe et de la Nuit. Elle avait un temple à Athènes, et un
autel à
Cadix.
On la caractérise sous la figure d'une vieille femme, couverte d'une draperie noire ou de la
couleur des feuilles mortes. De la main droite elle tient une coupe, et de la gauche elle s'appuie sur un bâton. Près d'elle on place souvent une clepsydre presque épuisée.
La Faim
La Faim, divinité, est fille de la Nuit. Virgile la place aux portes des Enfers, et d'autres sur les bords du
Cocyte. D'ordinaire, on la représente accroupie dans un champ aride, où quelques
arbres dépouillés de feuillage ne présentent qu'un ombrage triste et rare ; elle arrache avec ses ongles quelques plantes infertiles.
Les
Lacédémoniens avaient à Chalcicon, dans le temple de
Minerve, un tableau de la Faim, dont la
vue était effrayante. Elle était représentée dans ce temple sous la figure d'une femme hâve, pâle, abattue, d'une maigreur extrême, ayant les tempes creuses, la peau du front sèche et étirée, les yeux éteints, enfoncés dans la tête, les joues plombées, les lèvres livides, enfin, les bras décharnés ainsi que les mains qu'elle avait liées derrière le dos. Ovide a fait de la Faim une description qui n'est pas moins effrayante.
On ne peut décrire la Faim ou la Famine sans reporter ses souvenirs vers la
fable d'Erésichton, fils de Driops et aïeul maternel d'
Ulysse.
Il méprisait les
dieux ; et ne leur offrait jamais de sacrifices. Il eut la témérité de profaner à coups de
hache une antique
forêt consacrée à
Cérès et dont les
arbres étaient habités par autant de
dryades. La déesse chargea la Faim, ou la Famine, de le punir de son
impiété. Le monstre pénétra au fond des entrailles de ce malheureux pendant qu'il dormait.
En vain Erésichton fit appel aux ressources de sa fille,
Métra, aimée de
Neptune et qui avait obtenu de ce
dieu le don de prendre toutes les formes de la nature ; l'infortuné père, en proie à une faim dévorante, que rien ne pouvait calmer, finit par se dévorer lui-même.
La Pauvreté
La Pauvreté, divinité
allégorique, est fille du Luxe et de l'Oisiveté. On la fait aussi naître de la Débauche, parce que les débauchés incorrigibles s'acheminent vers une ruine certaine. Suivant Théocrite, la Pauvreté, en grec Pénia, est la mère
de l'Industrie et de tous les Arts. C'est elle qui éveille l'activité des hommes en leur faisant sentir leur dénûment et les avantages du bien-être.
On la représente sous les traits d'une femme pâle, inquiète, mal vêtue, glanant dans un champ déjà moissonné.
La Volupté
La Volupté est une déesse personnifiée sous les traits d'une belle femme dont les joues sont colorées du plus vif
incarnat : ses
couleurs sont empruntées à l'artifice, ses regards languissants dénotent une grande mollesse, et son attitude manque de modestie. Elle est étendue sur un
lit de
fleurs, et tient à la main une boule de verre qui a des ailes.
La Vérité
La Vérité, fille de
Saturne ou du Temps, est mère de la Justice et de la Vertu. Pindare lui donne pour père le souverain des
dieux. On la représente sous la figure d'une femme souriante, mais modeste.
Elle est nue, tient de la main droite un
soleil qu'elle fixe, de la gauche un livre ouvert avec une palme ; et sous l'un de ses pieds le globe du monde.
Quelquefois on lui donne un miroir, et souvent ce miroir est orné de
fleurs. Plus rarement on la représente, dans toute sa nudité, et sortant d'un puits.
La Vertu
La Vertu, fille de la Vérité, était plus qu'une déesse
allégorique. Les Romains lui érigèrent un temple. Ils en avaient aussi élevé un à l'Honneur, et il fallait passer par l'un pour arriver à l'autre, idée ingénieuse par laquelle ils voulaient faire comprendre que l'Honneur ne réside que dans les actions vertueuses.
La Vertu est représentée sous la figure d'une femme simple et modeste, vêtue de blanc, et dont le maintien commande le respect. Elle est assise sur une pierre carrée, et présente ou porte une
couronne de laurier. Parfois elle tient une pique ou un sceptre.
On lui donne aussi des ailes déployées pour signifier qu'elle s'élève au-dessus du vulgaire par ses efforts généreux. Le cube sur lequel elle repose indique sa solidité.
La Persuasion
La déesse de la Persuasion, en grec Pitho, en latin Suada ou Suadela, était regardée comme la fille de
Vénus. Elle se trouve ordinairement dans son cortège ou à ses côtés avec les
Grâces.
Thésée, ayant persuadé à tous les peuples de l'
Attique de se réunir dans une même ville, introduisit à cette occasion le culte de cette déesse.
Hypermnestre, fille de
Danaüs, après avoir gagné sa cause contre son père, qui la poursuivit en justice pour avoir sauvé la vie à son mari contre ses ordres, dédia un
sanctuaire à la même déesse.
Pitho avait aussi dans le temple de
Bacchus, à
Mégare, une statue de la main de Praxitèle.
Egialée, fils d'
Adraste, roi d'
Argos et de
Mégare, lui avait bâti un temple, parce que, dans un temps de peste,
Apollon et
Diane, irrités contre cette dernière ville, s'étaient laissé fléchir par les prières de sept jeunes garçons et de sept jeunes filles.
Phidias avait représenté la déesse Pitho sur la base du trône de Jupiter
Olympien, au moment où elle
couronne Vénus. Sur un bas-relief antique, conservé à Naples, on la voit dans un groupe qui représente
Vénus et
Hélène assises avec
Pâris et un Génie ailé ou l'
Amour debout.
A Rome, Suada, déesse de la persuasion et de l'éloquence, présidait aussi aux
mariages.
Dans les arts, la Persuasion est personnifiée sous les traits d'une femme à la physionomie heureuse. Sa coiffure simple est surmontée d'un ornement en forme de langue humaine ; son vêtement modeste est entouré d'un réseau d'or, et elle s'occupe à attirer vers elle un
animal étrange dont les trois têtes sont celles du singe, du
chat et du
chien.
La Sagesse
Les anciens représentaient la Sagesse sous la figure de
Minerve, avec un rameau d'olivier à la main,
emblème de la paix intérieure et extérieure.
Son symbole ordinaire était la chouette,
symbole aussi de
Minerve.
Les
Lacédémoniens donnaient à la Sagesse la figure d'un jeune homme ayant quatre mains, quatre oreilles,
symbole d'activité et de docilité ; un carquois au côté, et une flûte à la main droite, pour exprimer qu'elle doit se trouver dans les travaux et même dans les plaisirs.
La Reconnaissance
La Gratitude ou Reconnaissance est représentée sous la figure d'une femme qui tient d'une main un rameau de
fèves ou de
lupins, et de l'autre une cigogne,
oiseau qui, dit-on, a soin de ses parents dans leur vieillesse.
Mnémosyne ou la Mémoire
Mnémosyne, ou la déesse Mémoire, aimée de Jupiter et mère des neuf Muses, est représentée par une femme qui soutient son menton, attitude de la méditation. Quelques anciens l'ont peinte sous les traits d'une femme d'âge presque mûr ; elle a une coiffure enrichie de perles et de pierreries, et se tient le bout de l'oreille avec les deux premiers doigts de la main droite.
La Victoire
Les Grecs faisaient de la Victoire une puissante divinité. Elle était fille du
Styx et de Pallante ou
Pallas, celle-ci fille de Crius et d'Eurybie. Les
Sabins l'appelaient Vacuna.
La déesse Victoire avait plusieurs temples en Grèce, en Italie et à Rome. On la représente ordinairement avec des ailes, tenant d'une main une
couronne de laurier, et de l'autre une palme. Quelquefois elle est montée sur un globe.
Quand les anciens voulaient désigner une victoire navale, ils la représentaient debout sur la proue d'un vaisseau.
L'Amitié
L'Amitié, divinité
allégorique, était en honneur chez les Grecs et les Romains. En Grèce, ses statues étaient vêtues d'une robe agrafée, avaient la tête nue, et la poitrine découverte jusqu'à l'endroit du cur, où elle portait la main droite, embrassant de la gauche un rameau sec autour duquel croissait une vigne chargée de raisins.
Les Romains la représentaient sous la figure d'une jeune fille simplement vêtue d'une robe blanche, la gorge à moitié nue, couronnée de
myrte et de
fleurs de grenadier entrelacés, avec ces mots sur le front :
Hiver et été. La frange de sa tunique portait ces deux autres mots : La mort et la Vie. De la main droite elle montrait son côté ouvert jusqu'au cur ; on y lisait : De près et de loin. On la peignait aussi les pieds nus.
La Santé
On a vu que la Santé ou
Hygiée, fille d'Esculape et de Lampétie, était honorée chez les Grecs comme une des plus puissantes divinités. Les Romains avaient adopté le culte de cette déesse qu'ils honoraient sous le nom de Salus. Ils lui consacrèrent plusieurs temples dans Rome et instituèrent un
collège de
prêtres chargés de les desservir. Ces
prêtres seuls avaient le droit de voir la statue de la déesse ; ils prétendaient aussi être seuls en droit de demander aux
dieux la santé des particuliers et le salut de l'Etat, car l'Empire romain, considéré comme un grand
corps, était mis sous la protection de cette divinité.
On la représentait sous la figure d'une jeune personne assise sur un trône, couronnée d'herbes médicinales, tenant, une
patère de la main droite et un
serpent de la gauche. Près d'elle était un
autel autour duquel un
serpent faisait un cercle de sorte que sa tête se relevait au-dessus de
l'
autel.
L'Espérance
L'Espérance, divinité
allégorique, était particulièrement révérée des Romains. Ils lui élevèrent plusieurs temples. Elle était, selon les poètes, sur du Sommeil qui suspend nos peines, et de la Mort qui les finit. Pindare l'appelle la nourrice des vieillards.
On la représente sous les traits d'une jeune nymphe, l'
air empreint d'une grande sérénité, souriant avec grâce, couronnée de
fleurs naissantes, et tenant à la main un bouquet de ces mêmes
fleurs. Elle a pour
emblème la
couleur verte, la fraîche et abondante verdure étant un présage d'une belle récolte de grains. Les modernes lui ont donné pour attribut une ancre de navire : ce
symbole ne se trouve sur aucun monument ancien.
La Piété
La Piété présidait elle-même au culte qu'on lui rendait, à la tendresse des parents pour leurs
enfants, aux soins respectueux des
enfants envers leurs parents, et à l'affection de l'homme envers son semblable. On lui offrait des sacrifices, particulièrement chez les Athéniens ; et à Rome, elle était en très grand honneur.
Ordinairement on la voit sous la figure d'une femme assise, couverte d'un grand voile, tenant une corne d'abondance de la main droite, et posant la gauche sur la tête d'un
enfant ; à ses pieds est une cigogne.
Manius Acilius Glabrion bâtit dans Rome un temple à la Piété en l'honneur de cette jeune femme qui nourrit son père en prison : c'est le sujet du tableau d'André del Sarto, connu sous le nom de la
Charité romaine.
Les Jeux et les Ris
Les
Jeux, en latin Joci, sont les
dieux qui président à tous les agréments, de quelque nature qu'ils soient, du
corps et de l'
esprit. On les représente comme de jeunes
enfants avec des ailes de papillon, nus, riant, badinant toujours, mais avec grâce. Ils forment avec les
Ris et les
Amours la cour de
Vénus, et ne quittent jamais leur souveraine.
Le
dieu des ris et de la gaieté était particulièrement honoré à Sparte.
Lycurgue lui avait consacré une statue. Les
Lacédémoniens le considéraient comme le plus aimable de tous les
dieux et celui qui savait le mieux
adoucir les peines de la vie. Les Thessaliens célébraient sa fête avec une vive allégresse et une décente gaieté.